jeudi 28 mai 2015

Fin du carnet de circulation?


Déposée par des députés PS en décembre 2013, la proposition de loi  "relative au statut, à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage” pourrait enfin abolir la plupart des discriminations administratives qui pèsent sur les Gens du voyage. La proposition de loi, inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le 9 juin 2015 abroge complètement la loi du 3 janvier 1969 sur le statut administratif des gens du voyage, qui les obligeait à posséder un livret de ciruclation.


Les gens du voyage pourraient devenir « Français à part entière »
LE MONDE | 27.05.2015
Par Hélène Bekmezian et Maryline Baumard


Les gens du voyage passeront-ils du statut de « Français entièrement à part » à celui de « Français à part entière »  ? La question, posée par le préfet de Mayotte Hubert Derache dans un rapport remis au gouvernement en juillet 2013, pourrait trouver prochainement une réponse législative. Les députés ont en effet approuvé mercredi 27 mai en commission la proposition de loi du député socialiste de Loire-Atlantique Dominique Raimbourg visant entre autres à supprimer le livret de circulation. Une survivance de l’Ancien Régime qui voulait contrôler nomadisme et vagabondage.
« Bien que français, les gens du voyage doivent encore pointer régulièrement au commissariat ou à la gendarmerie » , déplore Olivier Le Mailloux, un avocat marseillais spécialiste de la question. En effet, les « personnes n’ayant pas de domicile fixe ni de résidence fixe depuis plus de six mois, et âgées de plus de 16 ans » ont obligation d’avoir sur eux un livret de circulation à jour.

Quelques exceptions ont été apportées en octobre 2012 à cette mesure vexatoire : certaines catégories de population itinérante ont été exemptées de livret. A l’époque, « le Conseil constitutionnel a ouvert une brèche dans l’évolution manifestement jugée trop lente des gens du voyage dans leur longue marche vers l’égalité républicaine » , rappelle Hubert Derache dans son rapport.

"Données anthropométriques"

C’est Me Le Mailloux qui est derrière cette avancée. La question prioritaire de constitutionnalité qu’il a déposée est alors venue à bout du « carnet de circulation », la version la plus inquisitrice de cette famille de documents puisque « dans ce carnet figuraient des données anthropométriques comme la circonférence de tête ou la couleur du teint », s’insurge l’avocat. Il reste le livret, moins contraignant, mais toujours présent.
La proposition de loi portée par M. Raimbourg, qui se décline en trois volets, veut accélérer l’insertion de ce groupe de population dans le droit commun. Outre la fin des livrets, il inclut une obligation renforcée pour les communes de construire des aires d’accueil et leur octroie en retour la possibilité d’expulser plus aisément ceux qui s’installeraient ailleurs que dans un endroit balisé.

> Lire la suite <

lundi 25 mai 2015

Jérusalem-Est en danger

Tribune cosignée par Pierre Tartakowsky, Président de la Ligue des Droits de l'Homme et du citoyen, publiée sur Mediapart.

A l’occasion de l’anniversaire de la résolution 252 des Nations unies sur le statut de Jérusalem, la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, ainsi que de nombreux députés, sénateurs, anciens ambassadeurs français, responsables associatifs et universitaires, etc. dénoncent à quel point le statut de Jérusalem Est comme capitale d’un futur Etat palestinien est critique. Le gouvernement israélien a encore récemment autorisé la construction de 900 logements de colons à Jérusalem-Est. Ils demandent à la France et à l’UE de prendre des mesures pour protéger le statut de la ville. 


Le 21 mai 1968 par la résolution 252, le Conseil de sécurité de l’ONU déclarait illégale l’annexion de Jérusalem-Est par l’Etat d’Israël. En ce jour commémoratif, nous condamnons l’avance constante de la colonisation, les discriminations graves et la répression envers les Palestiniens. Nous voulons aussi rappeler à leurs devoirs l’Union européenne et la France, garants du droit international.

Une politique de colonisation, dépossessions, démolitions, expulsions

Monde diplomatique
Au lendemain de la guerre de 1967, Israël occupe et annexe illégalement Jérusalem-Est, y fonde ses premières colonies et les étend d’année en année, chassant les Palestiniens de leurs terres et y installant plus de 210 000 colons. Les mises en chantier ont crû de 40% entre 2013 et 2014, pendant les dernières “discussions de paix“. Les colonies séparent  les quartiers palestiniens les uns des autres et leur interdisent tout développement. Etranglés et surpeuplés, ceux-ci étouffent, mais 99% des demandes de permis de construire y sont refusées alors qu’il manque plus de 40 000 logements. C’est ainsi que 20 000 immeubles construits sans permis sont menacés de démolition, un moyen de réduire d’autant la population palestinienne. Plus à l’est, l’immense “zone E1“ - 3 500 logements prévus pour 14 500 colons - assurera l’encerclement de Jérusalem en continuité avec la grosse colonie de Maale Adumim. Avec ce projet, Israël franchit, en toute impunité, une nouvelle ligne rouge posée par la communauté internationale.

mais aussi, une tentative d’éviction rampante par l’appauvrissement, les discriminations, les entraves

Israël poursuit inlassablement sa “politique démographique“ de judaïsation, visant à atteindre plus de 70% d‘habitants juifs à Jérusalem (environ 62% à ce jour). Tous les moyens sont utilisés pour pousser les Palestiniens de Jérusalem-Est au départ.
Ceux-ci ne sont pas citoyens israéliens mais “résidents permanents” – sous réserve de conditions très strictes – et tous les prétextes sont bons pour supprimer leurs permis. Ils sont rarement accordés aux conjoints issus de Cisjordanie ou de Gaza et de nombreux couples palestiniens doivent vivre séparés ou cachés (plus de 120 000 demandes de réunification familiale ont été rejetées depuis 2000). Ils sont souvent refusés aux enfants de ces couples. 12 000 enfants risquent ainsi la déportation et ne bénéficient d’aucun service d'éducation ou de santé. En 2012, le maire de Jérusalem a été jusqu’à proposer la suppression massive du statut de résident aux habitants des quartiers palestiniens à l’est du Mur. Une menace qui touche 70 000 Jérusalémites.

Les conditions de vie sont affectées par un sous-financement délibéré des zones palestiniennes où 38% de la population paient 33% des impôts, mais bénéficient de moins de 10% du budget municipal. D’où un cortège de conséquences dramatiques dans l’éducation (2 000 salles de classe manquantes), les infrastructures, la voirie, les aménagements collectifs, les services sociaux et, en fin de compte, sur l’économie locale (40% de chômage chez les hommes et un taux de pauvreté de 75%).

Le Mur et les points de contrôle empêchent les habitants de Cisjordanie de se rendre à Jérusalem sans permis, affectant toute vie de famille et tarissant les échanges économiques traditionnels. Les résidents vivant à l’est du Mur sont aussi coupés de fait des infrastructures, écoles, hôpitaux, lieux de travail, commerces dont ils dépendaient.

qui amènent violences, et maintenant provocations, des extrémistes

Ces situations d’exclusion et de harcèlement quotidiens créent un climat de violence permanent. Mais depuis l’apparition de micro-colonies idéologiques au coeur des quartiers palestiniens par des extrémistes qui investissent des immeubles et en chassent les occupants par la force, les confrontations deviennent physiques et atteignent un niveau insupportable. Ces colons se conduisent en maîtres des lieux jusqu’à investir l’Esplanade des Mosquées en toute impunité. La police et l’armée israéliennes ne les en empêchent pas, mais, pire, ils répriment toute contestation des Palestiniens avec une violence qui vise en particulier les enfants.

Au-delà des pressions diplomatiques, des mesures concrètes s’imposent

Les tensions montent à Jérusalem-Est et la ville est au bord de l’explosion, comme le souligne le dernier rapport des représentants européens à Jérusalem. L’inquiétude sur son avenir aussi, sa viabilité comme future capitale de l’Etat de Palestine, mais aussi son identité religieuse et culturelle. Et pourtant Israël continue d'imposer cette colonisation en toute impunité.

La France et l’UE doivent de toute urgence protéger le statut de la ville en reconnaissant l’Etat de Palestine et Jérusalem-Est comme sa capitale. Elles doivent aussi mettre officiellement fin à toute forme de relations avec les colonies israéliennes, sans oublier celles de Jérusalem-Est. Les mesures techniques existent, l’UE les a récemment mises en place avec la Crimée. Le rapport 2015 des consuls européens les recommande et les détaille. La France et l’UE doivent rapidement les mettre en œuvre.

Signataires :  

Pouria Amirshahi (député), François Asensi (député), Eliane Assassi (sénatrice), Guy Aurenche (président du Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement - Terre Solidaire), Etienne Balibar (universitaire), Ericka Bareigts (députée), Daniel Beauchêne (président de la fédération Artisans du Monde), Marie-France Beaufils (sénatrice), Esther Benbassa (sénatrice), Danielle Bidart-Reydet (sénatrice honoraire, présidente de l'association "Pour Jérusalem"), Michel Billout (sénateur), Pierre Blanc (universitaire et rédacteur en chef de confluences Méditerranée), Michel Bock (conseiller régional d’Île-de-France), Jean-Pierre Bosino (sénateur), Rony Brauman (ancien président de Médecin sans Frontières, essayiste), Jean Brétéché (ancien ambassadeur de l'UE à Jérusalem), Maurice Buttin (président du Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient) Jean-Jacques Candelier (député), Jean-Noël Carpentier (député), Monique Cerisier-Benguiga (sénatrice honoraire, vice-présidente de l'association pour Jérusalem), Jean-Paul Chagnollaud (universitaire), Lucien Champenois (diplomate honoraire, vice-président de l'association pour Jérusalem) Monique Chemilier-Gendreau (juriste), Emmanuelle Cosse (secrétaire nationale Europe Ecologie – Les Verts), Monique Crinon (présidente du Centre d'études et d'initiatives de solidarité internationale), Cécile Cukierman (sénatrice), sœur Béatrix Dagras (co-présidente du Groupe d’Amitié Islamo-Chrétienne), Annie David (sénatrice), Michelle Demessine (sénatrice), Haydar Demiryurek (co-président du Groupe d’Amitié Islamo-Chrétienne), Evelyne Didier (sénatrice), Bernard Dréano (président de l'Assemblée européenne des citoyens), Ivar Ekland (président de l'Association des Universitaires pour le Respect du Droit International en Palestine), Christian Favier (sénateur), Jacques Fournier (conseiller d'Etat Honoraire), Josette Gazzaniga (présidente du Mouvement International de la Réconciliation), Jean Glavany (député), Sylvie Goy-Chavent (sénatrice), Christian Graeff (ancien ambassadeur de France, président fondateur de l'association Brigades Internationales Pour la Paix - Collectif d'Aix en Provence). Maria Graeff-Wassink (psycho-sociologue, membre fondateur de BIPP-AIX), Jean-Guy Greilsammer (co-président de l’Union Juive Française pour la Paix), Christiane Hessel (épouse de Stéphane Hessel), Geneviève Jacques (présidente de la Cimade), Menachem Klein (universitaire israélien), Pierre Laurent (sénateur), Patrick Le Hyaric (eurodéputé), Renée le Mignot (co-présidente du Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples), Père Michel Lelong (ancien Professeur à l'Institut Catholique), Claude Léostic (présidente de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine), Roland Lombard (président du Collectif Interuniversitaire pour la Coopération avec les Universités Palestiniennes), Sandrine Mansour-Mérien (historienne), Gustave Massiah (président de l'association Amorces), Céline Méresse (présidente du Centre international de culture populaire), Veronique Moreira (vice-présidente du Conseil régional Rhône-Alpes), Zakaria Odeh (directeur de la Coalition civique pour Jérusalem), Jacques Picard (conseiller régional d’Île-de-France), Pierre Stanbul (co-président de l’Union Juive Française pour la Paix), Christophe Premat (député), Christine Prunaud (sénatrice), Bernard Ravenel (historien et président d’honneur de l’Association France Palestine Solidarité), Gilbert Roger (sénateur), Bernard Salamand (président du Centre de Recherche et d'Information pour le Développement), Mounir Satouri (conseiller régional d’Île-de-France), Monseigneur Marc Stenger (président de Pax Christi France), Taoufiq Tahani (président de l'Association France Palestine Solidarité), Pierre Tartakowsky (président de Ligue des Droits de l’Homme et du citoyen), Gérard Toulouse (physicien, membre fondateur de l'Académie des Technologies), Dominique Vidal (journaliste), Michel Warschawski (directeur de l'Alternative Information Center).

mercredi 20 mai 2015

Mineurs isolés / Stop aux tests osseux



Communiqué LDH, GISTI, SM
 Paris, le 15 mai 2015 


Mineurs isolés étrangers : les apparences pour preuve

À un adolescent malien seul en France, porteur d’un acte de naissance et d’une carte d’identité établissant sa minorité, la cour d’appel de Paris rétorque que « son allure et son attitude ne corroborent pas sa minorité » (décision CA Paris du 26 mars 2015). Une affirmation lourde de conséquence puisque la cour laisse ce jeune à la rue en refusant sa prise en charge par l’Aide sociale à l’enfance. Pour rendre cette invraisemblable décision, la cour n’a pas seulement renié toute humanité, elle a dû, aussi, tordre le droit. C’est l’article 47 du Code civil qui a fait les frais de l’opération.
L’article prévoit que tout acte d’état civil étranger fait foi sauf si d’autres éléments établissent qu’il est irrégulier ou falsifié. En l’espèce, aucune preuve ni aucun indice d’irrégularité ou de falsification des actes d’état civil du mineur n’étaient joints au dossier : au contraire, le service chargé de traquer la fraude documentaire les avait jugés authentiques ! Peu importe : le récit qu’il a fait de sa vie leur ayant semblé peu cohérent, les magistrats ont imaginé de soumettre cet enfant à une expertise osseuse.
Non contents de lui infliger cette épreuve injustifiée, ils ont prévu qu’il devrait être assisté de son avocat ou « d’un professionnel » d’une association d’aide aux mineurs. Peu importe, encore, que l’ADJIE (Accompagnement et défense des jeunes étrangers isolés qui est en fait un collectif d’associations) ait toujours refusé de cautionner ces examens osseux dont la fiabilité est déniée par les plus hautes autorités médicales. L’enfant s’étant rendu chez le médecin muni d’un courrier de l’ADJIE disant ne pouvoir être présente, les examens n’ont pas été réalisés. Les juges en ont pris prétexte pour le rendre responsable du « défaut d’exécution » de l’expertise.
Le raisonnement est doublement fallacieux. D’abord parce qu’il impose à un jeune en détresse, qui ne parle ni ne lit le français, de coopérer à la démonstration d’une minorité que les juges devait tenir pour acquise. Ensuite parce qu’il le rend comptable du refus légitime d’un collectif associations de s’associer à cet acharnement dans la suspicion. Et ce, pour conclure sans trembler que, quoi qu’en disent ses actes d’état civil, ce jeune aura l’âge qu’il a l’air d’avoir.
« La chronique quotidienne de l’enfance malheureuse rappelle aux pouvoirs publics l’urgente nécessité de renforcer la protection civile des mineurs » affirme le préambule de l’ordonnance de 1958 relative à la protection de l’enfance et de l’adolescence en danger. Aujourd’hui, parce qu’ils sont étrangers, certains enfants sont à ce point indésirables que la justice en vient, pour leur refuser cette protection, à dénier leur minorité en utilisant les expédients de pseudo-expertises ou en tenant les apparences pour preuve.

Alors que la communauté scientifique s’accorde pour dénier toute force probante aux tests osseux et dentaires, que les documents d’identité font foi, l’administration et la justice persistent à recourir à cette technique inepte. Il est plus que temps d’y renoncer.


Organisations signataires :

Groupe d’information et de soutien des immigré·e·s 
Ligue des droits de l’Homme 
Syndicat de la magistrature
_____________________________________

Plus de 12 000 personnes, répondant à un appel publié dans Le Monde.fr le 17 janvier 2015, ont signé une pétition demandant au Président de la République et à la Ministre de la Justice d’interdire les tests d’âges osseux et autres examens uniquement physiologiques qui n’ont aucune pertinence pour déterminer leur âge légal.

Procès de Clichy sous bois

Communiqué LDH
Paris, le 19 mai 2015


Zyed et Bouna : triste verdict, triste justice



En relaxant les deux policiers poursuivis pour non-assistance à personne en danger, en les dédouanant au point d’oublier que la police a aussi pour mission de protéger, le tribunal correctionnel de Rennes a sans doute suivi sa logique. Mais il a surtout rendu un verdict terrible contre la justice elle-même.
Car ce jugement a toutes les apparences de l’injustice.  Il en a l’allure, il en a le goût, il en a l’odeur et il en a les mots. Il en aura l’impact.
Comment en effet sera-t-il possible de prétendre que les policiers, à l’instar de tous les citoyens, sont responsables de leurs actes, comme de leur inaction ?
Comment pourra-t-on faire croire aux habitants de Clichy-sous-Bois qu’ils sont considérés à l’égal des autres citoyens de ce pays ?
Comment pourra-t-on espérer dire que justice a été rendue avec un « deux poids, deux mesures » aussi écrasant ?
Le triste verdict de Rennes vient s’ajouter à un sentiment d’injustice et de mépris, au climat de méfiance et de violence latente existant entre les forces de l’ordre et les habitants des quartiers d’habitat social, singulièrement une bonne partie de la jeunesse qui y réside. Qu’on ne s’y trompe pas, le silence incrédule avec lequel le pays l’a accueilli – exception faite de quelques cris de joie du Front national ou de membres de l’UMP – n’est pas de bon augure. Lorsque des hommes et des femmes ne croient plus en la justice de la République, c’est la démocratie elle-même qui est en péril.
Les quartiers relégués, celles et ceux qui sont victimes de la crise sociale, des inégalités territoriales, de toutes sortes de discriminations et se voient, de surcroît, exposés à des contrôles policiers incessants et indignes, vont continuer de réclamer une tout autre justice.

lundi 4 mai 2015

Surveillance généralisée



Lettre ouverte au Député M. Jean-René Marsac

Redon, le 03 mai 2015

Monsieur,

Le 11 janvier dernier, nous étions des millions de personnes dans la rue pour soutenir la liberté d'expression contre les fanatiques.
Aujourd'hui, le gouvernement, sous prétexte de lutter conte le terrorisme, cherche à légaliser des mesures de surveillance jusqu'ici interdites. La séparation des pouvoirs s'estompe, l'exécutif prend le pas sur le législatif et nos députés ne font pas leur travail (voir le nombre d'absence de députés).

Qu'un gouvernement (de gauche) fasse voter une loi aussi liberticide, nous emplit de stupeur et d'effroi. Au nom des valeurs dont nous espérons qu'elles sont toujours les vôtres, ne vous rendez-pas complices de cette loi.
Car c'est la démocratie et notre avenir à tous que vous mettez en grand danger.
Vous avez une lourde responsabilité, celle de prendre le risque de voter une loi intrinsèquement mauvaise, qui risque de l'être encore plus entre de mauvaises mains.
C'est pourquoi, nous vous demandons, Monsieur le Député, de ne pas voter cette loi.

Nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Député, nos salutations républicaines.

Mireille Spiteri
Présidente LDH Pays de Redon


_________________________________

Mediapart 
Lettre à ceux qui s'en foutent par Laurent Chemla


Cette fois-ci, c'est à vous, citoyens, que je m'adresse.
Vous qui avez entendu parler d'une certaine "loi sur le renseignement", mais qui vous en foutez.
J'aurais pû, comme beaucoup, revenir sur les débats qui ont conduit nos représentants à voter cette loi délirante, me moquer du faible nombre de députés présents à l'enterrement de l'état de droit, féliciter les 5 qui ont fait leur boulot honnêtement et porter l'opprobre sur un ministre de l'intérieur qui n'a cessé de montrer qu'il n'avait que morgue et mépris pour la très longue liste d'organismes et de personnes - tous bien plus qualifiés que lui - qui critiquaient son texte dans les medias.

À quoi bon ?

Nos représentants nous représentent. Et, dans le cadre de cette loi, ils n'ont rien fait d'autre.

Combien étiez vous qui, quand mes camarades de la Quadrature du Net essayaient de convaincre de l'importance de ce texte pour vos libertés, ont répondu "Bof, je m'en fous, je n'ai rien à cacher" ?



dimanche 26 avril 2015

Morts en méditerrannée: le déshonneur du Conseil européen


Communiqué commun 
Bruxelles, le 24 avril 2015


En ce mauvais jour du 23 avril 2015, le Conseil européen qui devait enfin « agir » sur une situation « dramatique » en Méditerranée, s'est contenté de tenter de mettre l’Union européenne et ses États membres à l’abri des migrants en renforçant la protection de ses frontières.
A ces milliers d'êtres humains, femmes, hommes et enfants qui risquent la mort, et souvent la trouvent, en tentant de rejoindre des lieux pour se reconstruire et vivre, les chefs de gouvernement européens, réunis à grand bruit, n'ont eu qu'un seul message à leur envoyer : « Sécurité ! ». Ils n'ont pas cherché à sortir d'une concurrence entre les Etats membres, essayant chacun de prendre le moins possible des migrants après avoir rejeté tous les autres. Quant au mot « accueil », il ne fait pas partie du vocabulaire des chefs de gouvernement.
Lutte contre l’émigration avec l’appui des pays tiers, reconduite à la frontière, refoulement, rétention dans les centres spécialisés, pénalisation de l'entrée... Voilà ce que vont connaître les survivants quand elles et ils auront fini de compter leurs morts. Le Conseil européen en prenant ces mesures honteuses considère que sa responsabilité n’est pas engagée. Il ajoute ainsi aux morts son propre déshonneur.
Les associations et organisations qui à travers l'Europe défendent les droits de toute personne à vivre quelque part en sûreté, ne peuvent l'accepter et décideront dans les semaines à venir des moyens pour s'opposer à cette politique mortifère. 





Une pétition initiée par la section LDH de l’EHESS, le Collectif de soutien de l’EHESS aux sans-papiers et aux migrant-e-s et qui peut être signée en ligne ici :


« Un appel à Monsieur Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur et à Monsieur Manuel Valls, Premier ministre
3 419 migrantes et migrants morts en Méditerranée en 2014, 300 dans la seule seconde semaine de février 2015 au large de Lampedusa : s’y sont ajoutés 400 disparus le deuxième week-end d’avril, 40 nouveaux morts mercredi dernier et 700 naufragés ce troisième week-end, tel est le dramatique bilan de la politique de fermeture des frontières menée par l’Union Européenne, de Ceuta et Mellila en face de Gibraltar au fleuve Evros en Grèce du Nord. 
La France n’échappe à cette politique d’érection de barrières physiques et répressives opposées à migrantes et migrants. Non pas en Méditerranée, mais à Calais où tous les campements de fortune de migrants viennent d’être évacués pour être réunis loin de tout, dans un « bidonville d’Etat » soumis à un constant contrôle policier. »

Texte de la pétition
« La politique concertée de rejet des migrants et des migrantes menée par l’Union européenne a provoqué, depuis le tournant du siècle, la mort de plus de 22000 migrantes et migrants en Méditerranée. Le nombre des disparus pour ce seul début du mois d'avril 2015 s'élève à plus de 1100. Quant aux survivants, ils sont confinés dans des camps de rétention quand ils ne sont pas jetés à la rue dans le dénuement le plus total ou quand il ne sont pas regroupés dans une "bidonville d'Etat" comme c'est le cas désormais hors de Calais.
Ne faut-il pas dénoncer un crime contre l’humanité tel que le définissent les conventions internationales que la France a signées ?

Quoi qu’il en soit, depuis l’été dernier les associations de soutien aux migrants actives à Calais n’ont fait qu’appeler l’attention des autorités politiques et du public sur les conditions d’insoutenable insalubrité et de promiscuité inadmissible régnant dans d’aléatoires campements de fortune, régulièrement évacués et détruits par les forces de police.
À notre tour nous demandons à Monsieur Bernard Cazeneuve, Ministre de l’intérieur (avec copie à Monsieur Manuel Valls, Premier Ministre), qu’il fasse cesser à Calais et dans le Calaisis toutes les mesures répressives prises à l’égard de migrantes et des migrants, et qu’à l’égard de ses collègues de l’Union européenne il tienne enfin les engagements humanitaires pris à l’issue de sa visite du 3 novembre 2014 à Calais même. »

jeudi 9 avril 2015

Laïcité, liberté


Déclaration commune :

Il ne faut pas toucher à la loi de 1905 !

Il faut défendre les libertés publiques !


Les associations laïques : Ligue de l’enseignement, Ligue des droits de l’Homme et Fédération nationale de la Libre pensée ont décidé de rendre publique cette déclaration au vu de la situation préoccupante qui existe dans ce pays aujourd’hui.


La laïcité, c’est la liberté !

La laïcité, qui est le libre exercice de sa conscience, est garantie par la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat de 1905. Elle est aujourd’hui menacée par ceux qui veulent en faire un instrument contre une certaine catégorie de la population : les citoyens d’origine arabo-musulmane.

Ainsi, on entend interdire les repas de substitution dans les cantines des collectivités publiques pour les végétariens et les personnes ne voulant pas, pour des raisons diverses, manger du porc. Imposer une nourriture contraire aux convictions personnelles, ne relève pas de la laïcité, mais de la xénophobie. S’il est juste d’un point de vue laïque de refuser de diffuser dans les collectivités publiques les produits casher et hallal, imposer des repas avec de la viande de porc relève de la discrimination.

Ainsi, on entend réclamer l’interdiction du voile dit « islamique » à l’Université. Rappelons qu’il existe, dans les facultés, les franchises universitaires qui sont des libertés arrachées au pouvoir et aux clergés. Remettre en cause les libertés universitaires ne relève pas de la laïcité, mais d’une remise en cause de la démocratie.

Ainsi une proposition  de loi qui doit être examinée en mai prévoit la modification du Code du travail ; on veut y intégrer des dispositions relevant de la sphère publique et de la nécessaire neutralité des agents des Fonctions publiques. Le Code du Travail régit les rapports entre les dirigeants d’entreprise et les salariés. Au sein des entreprises, la liberté de conscience est régie par l’Article 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. »

On veut étendre à l’infini la sphère publique et imposer  la nécessaire neutralité des agents des services publics à tous les salariés dans tous les secteurs de la vie économique et quotidienne. Cela relève d’une volonté de normalisation à outrance de la société et entraînerait une diminution drastique des espaces où s’exercent les libertés individuelles. C’est transformer les entreprises en champ clos d’affrontements communautaristes et religieux. Il est possible de mettre des limites à la liberté de comportement des salariés, en raison des besoins de l’entreprise et de la sécurité, mais cela doit être strictement délimité et soigneusement encadré. Aucune entreprise n’a le droit de posséder un blanc-seing pour régenter la conscience des salariés.

Ainsi, contre le principe de Séparation des Eglises et de l’Etat, on entend des propositions visant à suspendre, modifier, abroger la loi de 1905 pour «  intégrer » l’Islam. Rappelons que la loi de 1905 a été promulguée alors qu’il y avait 10 millions de musulmans sur le territoire de la République dans les 3 départements d’Algérie. Son article 44 prévoyait son application en Algérie. C’est pour des raisons d’intérêts colonialistes et de contrôle des « indigènes », via les imams qu’il fallait garder assujettis au système colonial, que cette disposition n’a jamais été appliquée, alors qu’elle était réclamée avec force par toute l’élite nationale et indépendantiste algérienne.

Rappelons aussi que les cultes bouddhistes (600 000 adeptes en France) ont été intégrés dans les dispositions des associations cultuelles prévues dans la loi de 1905 sans qu’il ait été besoin de modifier un mot de la loi de 1905. Il n’appartient pas à l’Etat et au gouvernement de s’ingérer dans l’organisation des cultes, ni de désigner ses « interlocuteurs officiels », ni de former les religieux et encore moins de délivrer des diplômes religieux. Nos associations rappellent ce que disait Victor Hugo : « L’Etat chez lui, les Eglises chez elles ». Toute autre disposition visant à l’ingérence de l’Etat dans les cultes relève de l’esprit de concordat.

La laïcité et les libertés sont menacées !

Comment ne pas être inquiets quand on prend connaissance du projet de loi présenté par le Premier Ministre qui « légalise  des mesures de surveillance jusqu’ici interdites. Les possibilités d’écoute, d’espionnage d’Internet et de visites clandestines de domiciles sont étendues. (Le Monde du 21 mars 2015). Et ce  pour protéger «   Les intérêts essentiels de la politique étrangère et l'exécution des engagements européens et internationaux de la France. Les intérêts économiques et scientifiques... »

Là aussi, la part des libertés individuelles ne cesse de se réduire au détriment du « tout sécuritaire ». Une grande menace se fait jour sur les libertés de communication téléphonique où les moyens techniques légalisés ne laisseront plus aucune part à la préservation de la vie privée. Tout est possible, tout sera-t-il permis ? Les moyens de contrôle sautent les uns après les autres. La CNIL n’a plus aucun rôle dans cette affaire et le juge judiciaire est totalement dessaisi au profit de l’Administration.

Comment ne pas être inquiets aussi quand l’une des nouvelles missions affectée aux services secrets est : « La prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique ? » Cette notion peut recouvrir tout et n’importe quoi, y compris dans le domaine social et syndical. Une nouvelle loi anticasseurs ?

Comment ne pas être aussi stupéfiés que la lutte antiterroriste et son dispositif légal aient conduit une personne en état d’ivresse avancée, qui n’était plus dans l’état de comprendre quoi que ce soit, à être condamnée à des années de prison pour des propos d’ivrogne ?

Il serait temps de se rappeler ce que disait Benjamin Franklin : « Ceux qui pensent qu’en abandonnant un peu de liberté, ils auront un peu plus de sécurité, n’auront au bout de chemin ni sécurité ni liberté. »

Il faut défendre nos libertés et la laïcité :
Il s’agit de notre liberté de conscience !