jeudi 24 avril 2014

Blues pour clandestins

John Stanmeyer, agence VII, février 2013, pour le National Geographic. Prix World Press 2013. 


Qui sont-ils ces huit hommes sur une plage? 

Échoués quelque part vers Djibouti, lieu de transit des migrants en provenance de la Somalie, de l'Ethiopie ou de l'Erythrée. Ombres dans le clair de lune bleue, face à la mer étale tendant leur téléphone vers le ciel comme une prière contemporaine. Que cherchent-ils ? Un réseau, un signal. Pouvoir dire à ceux qui sont restés: « Je suis vivant ! ». Monochrome intense, cette photo dont la beauté transcende le tragique est aussi très musicale: Blues pour clandestins. Dans une époque où le chaos généralisé devient la norme cette photographie de migrants africains vient de remporter le prix World Press 2013 de la photographie. Mais nous hante le souvenir de tous les naufragé-e-s de Lampedusa ou d’ailleurs.


Voir le Musée de l'Histoire de l'immigration (Palais de la Porte Doré, Paris), des expositions, films, performances, conférences: Deux siècles d'immigration en France.
A la galerie des dons sont présentés des archives des objets, liés à des parcours de vie : instrument de musique, théière, la truelle du père de François Cavanna qui était maçon... Une valise avec écrit « je suis citoyen du pays que j’habite ».

mercredi 2 avril 2014

L'oligarchie ça suffit, vive la démocratie!

 

 L'oligarchie ça suffit, vive la démocratie!*






 L’oligarque est quelqu’un qui semble aimer le pouvoir pour la puissance et la richesse qu'il lui procure. Caste influente, l’oligarchie est une concentration croissante de pouvoir décisionnel par une élite restreinte de dirigeants politiques, grands chefs d’entreprises, financiers, journalistes, économistes, intellectuels…Ils délibèrent entre eux et appliquent leurs décisions à l’ensemble de la population. Le but final et exclusif étant de servir leurs intérêts personnels.

Au détriment du bien commun cette idéologie a contribué à exacerber les inégalités au profit des plus riches et à favoriser une collision entre les représentants politiques (élus) et les élites économiques . 
Le vrai visage des oligarques est apparu en 2008 au moment de l’adoption du traité de Lisbonne qui reprend les principales dispositions du traité constitutionnel de l’Union Européenne, alors que le peuple français et néerlandais se sont prononcés contre. Ils ont fait passer en force ce traité démocratiquement désapprouvé.

Au cœur du pouvoir, le club le plus puissant de France : LE SIÈCLE.
Au premier janvier 2014, le club quitte la place de la concorde pour le 33, rue du Faubourg Saint Honoré juste à côté de l’Élysée. 
Tous les derniers mercredis du mois, il se réunit dans les luxueux salons où les détenteurs du pouvoir économique, politique, médiatique, etc., participent à un cocktail et à un dîner où se nouent des contacts et au cours desquels des rendez-vous sont pris (plus de 700 membres et 200 invités). Les propos tenus à table ne doivent pas être divulgués. 
A côté des patrons du CAC 40, l’association regorge de personnalité de renom : Nicole Notat (Présidente du Siècle), Nicolas Sarkozy, François Fillon, Jean-François Copé, Dominique Strauss-Kahn, Rama Yade, Gérard Worms, Martine Aubry, P. Lamy (OMC), Pierre Moscovici, Rachida Dati, Favela Amara, Jacques Atali, Serge Dassault, Arlette Chabot (journaliste), Jean-Claude Trichet (Banque de France, Banque Européenne), Jean-Michel Colombani (Le Monde), Michel Cotta (journaliste), Michel Field (Europe1), Laurent Fabius, Aurélie Filippetti, François Bayrou, François Hollande, Jean-Pierre Chevènement, Lionel Jospin, Manuel Valls, Laurence Parisot (MEDEF) Ernest-Antoine Seillière (MEDEF), etc. 

Défaut de transparence, circuit parallèle de pouvoir échappant à tout examen démocratique, c'est une caste à part, affairiste et déconnectée de la diversité et de la réalité populaire.
La connivence entre les journalistes et des personnages influents se pose en terme de déontologie, nécessaire indépendance des journalistes à l’égard des puissants. Quelle légitimité alors accorder aux interviews ? 
Quand certaines personnalités politiques, telles que J.L. Mélenchon ou Eva Joly critiquent les médias et dénoncent une collision entre sphères politiques, journalistiques et affairistes, il sont immédiatement taxés de populistes et de démagogiques.
La démocratie s’est couchée dans le lit de l’économie libérale et l’accouplement entre la démocratie et le libéralisme économique a permis l’émergence d’une caste d’hyper-citoyens du marché mondial. Elle ne défend qu’en apparence les intérêts de la droite, car elle représente à titre égal les intérêts de la gauche. 

Il faut être réaliste, le monde est complexe, la politique aussi nous dira-t-on!  
« Réalisme, ce mot ne désigne pas une restitution du réel, mais une prise de position déterminée face au réel. La prise de position de ceux qui acceptent et soutiennent le monde indépendamment de sa qualité morale juste parce qu’il est tel qu’il est c’est-à-dire parce qu’il est un pouvoir. » (1)


 Mireille Spiteri



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1. Günther Anders, L'obsolescence de l'Homme. Tome 2. Sur la destruction de la vie à l'époque de la troisième révolution industrielle (1956), trad. de l’allemand par Christophe David, Paris, Fario, coll. Ivrea, 2011] 

* Hervé Kempf, L'oligarchie ça suffit, vive la démocratie, Paris, Seuil, 2011.