dimanche 26 avril 2015

Morts en méditerrannée: le déshonneur du Conseil européen


Communiqué commun 
Bruxelles, le 24 avril 2015


En ce mauvais jour du 23 avril 2015, le Conseil européen qui devait enfin « agir » sur une situation « dramatique » en Méditerranée, s'est contenté de tenter de mettre l’Union européenne et ses États membres à l’abri des migrants en renforçant la protection de ses frontières.
A ces milliers d'êtres humains, femmes, hommes et enfants qui risquent la mort, et souvent la trouvent, en tentant de rejoindre des lieux pour se reconstruire et vivre, les chefs de gouvernement européens, réunis à grand bruit, n'ont eu qu'un seul message à leur envoyer : « Sécurité ! ». Ils n'ont pas cherché à sortir d'une concurrence entre les Etats membres, essayant chacun de prendre le moins possible des migrants après avoir rejeté tous les autres. Quant au mot « accueil », il ne fait pas partie du vocabulaire des chefs de gouvernement.
Lutte contre l’émigration avec l’appui des pays tiers, reconduite à la frontière, refoulement, rétention dans les centres spécialisés, pénalisation de l'entrée... Voilà ce que vont connaître les survivants quand elles et ils auront fini de compter leurs morts. Le Conseil européen en prenant ces mesures honteuses considère que sa responsabilité n’est pas engagée. Il ajoute ainsi aux morts son propre déshonneur.
Les associations et organisations qui à travers l'Europe défendent les droits de toute personne à vivre quelque part en sûreté, ne peuvent l'accepter et décideront dans les semaines à venir des moyens pour s'opposer à cette politique mortifère. 





Une pétition initiée par la section LDH de l’EHESS, le Collectif de soutien de l’EHESS aux sans-papiers et aux migrant-e-s et qui peut être signée en ligne ici :


« Un appel à Monsieur Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur et à Monsieur Manuel Valls, Premier ministre
3 419 migrantes et migrants morts en Méditerranée en 2014, 300 dans la seule seconde semaine de février 2015 au large de Lampedusa : s’y sont ajoutés 400 disparus le deuxième week-end d’avril, 40 nouveaux morts mercredi dernier et 700 naufragés ce troisième week-end, tel est le dramatique bilan de la politique de fermeture des frontières menée par l’Union Européenne, de Ceuta et Mellila en face de Gibraltar au fleuve Evros en Grèce du Nord. 
La France n’échappe à cette politique d’érection de barrières physiques et répressives opposées à migrantes et migrants. Non pas en Méditerranée, mais à Calais où tous les campements de fortune de migrants viennent d’être évacués pour être réunis loin de tout, dans un « bidonville d’Etat » soumis à un constant contrôle policier. »

Texte de la pétition
« La politique concertée de rejet des migrants et des migrantes menée par l’Union européenne a provoqué, depuis le tournant du siècle, la mort de plus de 22000 migrantes et migrants en Méditerranée. Le nombre des disparus pour ce seul début du mois d'avril 2015 s'élève à plus de 1100. Quant aux survivants, ils sont confinés dans des camps de rétention quand ils ne sont pas jetés à la rue dans le dénuement le plus total ou quand il ne sont pas regroupés dans une "bidonville d'Etat" comme c'est le cas désormais hors de Calais.
Ne faut-il pas dénoncer un crime contre l’humanité tel que le définissent les conventions internationales que la France a signées ?

Quoi qu’il en soit, depuis l’été dernier les associations de soutien aux migrants actives à Calais n’ont fait qu’appeler l’attention des autorités politiques et du public sur les conditions d’insoutenable insalubrité et de promiscuité inadmissible régnant dans d’aléatoires campements de fortune, régulièrement évacués et détruits par les forces de police.
À notre tour nous demandons à Monsieur Bernard Cazeneuve, Ministre de l’intérieur (avec copie à Monsieur Manuel Valls, Premier Ministre), qu’il fasse cesser à Calais et dans le Calaisis toutes les mesures répressives prises à l’égard de migrantes et des migrants, et qu’à l’égard de ses collègues de l’Union européenne il tienne enfin les engagements humanitaires pris à l’issue de sa visite du 3 novembre 2014 à Calais même. »

jeudi 9 avril 2015

Laïcité, liberté


Déclaration commune :

Il ne faut pas toucher à la loi de 1905 !

Il faut défendre les libertés publiques !


Les associations laïques : Ligue de l’enseignement, Ligue des droits de l’Homme et Fédération nationale de la Libre pensée ont décidé de rendre publique cette déclaration au vu de la situation préoccupante qui existe dans ce pays aujourd’hui.


La laïcité, c’est la liberté !

La laïcité, qui est le libre exercice de sa conscience, est garantie par la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat de 1905. Elle est aujourd’hui menacée par ceux qui veulent en faire un instrument contre une certaine catégorie de la population : les citoyens d’origine arabo-musulmane.

Ainsi, on entend interdire les repas de substitution dans les cantines des collectivités publiques pour les végétariens et les personnes ne voulant pas, pour des raisons diverses, manger du porc. Imposer une nourriture contraire aux convictions personnelles, ne relève pas de la laïcité, mais de la xénophobie. S’il est juste d’un point de vue laïque de refuser de diffuser dans les collectivités publiques les produits casher et hallal, imposer des repas avec de la viande de porc relève de la discrimination.

Ainsi, on entend réclamer l’interdiction du voile dit « islamique » à l’Université. Rappelons qu’il existe, dans les facultés, les franchises universitaires qui sont des libertés arrachées au pouvoir et aux clergés. Remettre en cause les libertés universitaires ne relève pas de la laïcité, mais d’une remise en cause de la démocratie.

Ainsi une proposition  de loi qui doit être examinée en mai prévoit la modification du Code du travail ; on veut y intégrer des dispositions relevant de la sphère publique et de la nécessaire neutralité des agents des Fonctions publiques. Le Code du Travail régit les rapports entre les dirigeants d’entreprise et les salariés. Au sein des entreprises, la liberté de conscience est régie par l’Article 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. »

On veut étendre à l’infini la sphère publique et imposer  la nécessaire neutralité des agents des services publics à tous les salariés dans tous les secteurs de la vie économique et quotidienne. Cela relève d’une volonté de normalisation à outrance de la société et entraînerait une diminution drastique des espaces où s’exercent les libertés individuelles. C’est transformer les entreprises en champ clos d’affrontements communautaristes et religieux. Il est possible de mettre des limites à la liberté de comportement des salariés, en raison des besoins de l’entreprise et de la sécurité, mais cela doit être strictement délimité et soigneusement encadré. Aucune entreprise n’a le droit de posséder un blanc-seing pour régenter la conscience des salariés.

Ainsi, contre le principe de Séparation des Eglises et de l’Etat, on entend des propositions visant à suspendre, modifier, abroger la loi de 1905 pour «  intégrer » l’Islam. Rappelons que la loi de 1905 a été promulguée alors qu’il y avait 10 millions de musulmans sur le territoire de la République dans les 3 départements d’Algérie. Son article 44 prévoyait son application en Algérie. C’est pour des raisons d’intérêts colonialistes et de contrôle des « indigènes », via les imams qu’il fallait garder assujettis au système colonial, que cette disposition n’a jamais été appliquée, alors qu’elle était réclamée avec force par toute l’élite nationale et indépendantiste algérienne.

Rappelons aussi que les cultes bouddhistes (600 000 adeptes en France) ont été intégrés dans les dispositions des associations cultuelles prévues dans la loi de 1905 sans qu’il ait été besoin de modifier un mot de la loi de 1905. Il n’appartient pas à l’Etat et au gouvernement de s’ingérer dans l’organisation des cultes, ni de désigner ses « interlocuteurs officiels », ni de former les religieux et encore moins de délivrer des diplômes religieux. Nos associations rappellent ce que disait Victor Hugo : « L’Etat chez lui, les Eglises chez elles ». Toute autre disposition visant à l’ingérence de l’Etat dans les cultes relève de l’esprit de concordat.

La laïcité et les libertés sont menacées !

Comment ne pas être inquiets quand on prend connaissance du projet de loi présenté par le Premier Ministre qui « légalise  des mesures de surveillance jusqu’ici interdites. Les possibilités d’écoute, d’espionnage d’Internet et de visites clandestines de domiciles sont étendues. (Le Monde du 21 mars 2015). Et ce  pour protéger «   Les intérêts essentiels de la politique étrangère et l'exécution des engagements européens et internationaux de la France. Les intérêts économiques et scientifiques... »

Là aussi, la part des libertés individuelles ne cesse de se réduire au détriment du « tout sécuritaire ». Une grande menace se fait jour sur les libertés de communication téléphonique où les moyens techniques légalisés ne laisseront plus aucune part à la préservation de la vie privée. Tout est possible, tout sera-t-il permis ? Les moyens de contrôle sautent les uns après les autres. La CNIL n’a plus aucun rôle dans cette affaire et le juge judiciaire est totalement dessaisi au profit de l’Administration.

Comment ne pas être inquiets aussi quand l’une des nouvelles missions affectée aux services secrets est : « La prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique ? » Cette notion peut recouvrir tout et n’importe quoi, y compris dans le domaine social et syndical. Une nouvelle loi anticasseurs ?

Comment ne pas être aussi stupéfiés que la lutte antiterroriste et son dispositif légal aient conduit une personne en état d’ivresse avancée, qui n’était plus dans l’état de comprendre quoi que ce soit, à être condamnée à des années de prison pour des propos d’ivrogne ?

Il serait temps de se rappeler ce que disait Benjamin Franklin : « Ceux qui pensent qu’en abandonnant un peu de liberté, ils auront un peu plus de sécurité, n’auront au bout de chemin ni sécurité ni liberté. »

Il faut défendre nos libertés et la laïcité :
Il s’agit de notre liberté de conscience !